Le gel dans l’agriculture

Le gel dans l’agriculture

Le gel est chaque année un grand motif d’inquiétude, tout particulièrement pour le secteur arboricole et viticole, et en particulier au début du printemps (mi-mars à mi-mai). Cependant, tous les épisodes de gel ne représentent pas le même risque. Il est possible dans une certaine mesure de les prévoir, de s’en prémunir ou de s’en protéger. Explications.

CE N’EST PAS «le» gel mais «Les» gels

MétéoSuisse définit une situation de gel quand «la température à proximité du sol (mesurée à 5 cm au-dessus) baisse jusqu’au point de congélation, voire plus bas»; soit en général sous 0°C. Il existe deux types de gel: radiatif et advectif:

Le gel advectif est causé par le passage d’un front froid («air froid», «polaire» ou «arctique»). Il est surtout présent en hiver, plus rarement au printemps.

Le gel radiatif, lui, est causé par l’accumulation d’air froid au sol et est plus fréquent au printemps. Pour la petite histoire, au coucher du soleil, le sol perd la chaleur accumulée durant la journée, l’air chaud monte dans le ciel pendant que l’air froid s’accumule au sol. Cela provoque deux sortes de gelées: la gelée blanche par temps humide (les surfaces et végétaux semblent recouverts d’une fine couche de neige) et la gelée noire par temps sec, la plus dangereuse. Quand en plus vient s’ajouter un vent très fort, les dégâts peuvent être importants.

un problème pour les plantes en sève

La problématique du gel de printemps sur les arbres fruitiers et les vignes
Asperger les arbres permet de protéger les fruits du gel.

Le danger du gel est la transformation en glace du liquide dans les tissus vivants d’une plante. Ce sont la sève, les feuilles et les fleurs qui sont particulièrement menacées et non les parties ligneuses et dures (tronc, branches), ni les racines plus profondes. Seuls des gels extrêmes peuvent occasionner des dégâts sur ces dernières, comme en 1956 où des troncs d’arbres éclataient sous l’effet du gel.

Le gel n’est pas tellement un problème en hiver puisque la plante est «au repos» et que la sève circule moins. Les arbres ont même des mécanismes de défense contre les effets du gel en hiver: ils fabriquent de l’antigel et une protection contre le gel-dégel habituel à cette saison (réchauffement en journée, refroidissement le nuit). Certains arbres résistent mieux que d’autres au gel hivernal, et la plupart (y compris la vigne) supportent sans trop de problème -20°C même sans protection particulière.

Du colza victime du gel de printemps en 2021 © Patrick Messeiller
Du colza victime du gel de printemps en 2021 © Patrick Messeiller

En revanche, le gel est dangereux quand la sève recommence à circuler dans les plantes et quand sortent les bourgeons, fleurs et feuilles – soit au printemps ou en fin d’hiver. Le danger est présent jusqu’aux «saints de glace» (11, 12 et 13 mai), après quoi la tradition considère que le danger disparaît. Le réchauffement climatique – dont on pourrait penser qu’il diminue le risque de gel – peut en fait l’augmenter puisqu’il conduit les plantes à se réveiller plus tôt et à être donc plus vulnérables.

Pour les grandes cultures semées en automne (blé d’hiver, colza), le gel est également un danger, heureusement limité par l’effet protecteur de la neige.

prévenir et prévoir le gel

MétéoSuisse suit le gel comme le risque d’avalanche, de canicule, etc. Il est aussi attentivement surveillé par les agricultrices et agriculteurs, qui accumulent un important savoir local puisque le risque varie considérablement d’une zone à l’autre. Pour diminuer ce risque, les arbres et la vigne ne sont pas plantés n’importe où. Les abricotiers valaisans (dont les fleurs sortent très tôt) ne sont ainsi jamais installés sur les versants nord – sans quoi ils se développeraient trop tôt – mais plantés sur les versants sud. La vigne occupe l’autre côté nord parce qu’elle se développe plus tard et est donc moins sensible au gel.

Carte online MétéoSuisse du risque de gel au 4 avril 2022. Malgré les températures négatives exceptionnelles pour un mois d’avril, le risque de gel est faible (1, « aucun danger ou faible danger »).
Carte online MétéoSuisse du risque de gel au 4 avril 2022. Malgré les températures négatives exceptionnelles pour un mois d’avril, le risque de gel est faible (1, «aucun danger ou faible danger»).

Capteur de température au plus proche du bourgeon. Système SmartBud, Ecosensors. Photo N. Messieux.
Capteur de température au plus proche du bourgeon. Système SmartBud, Ecosensors. © N. Messieux.

Pour prévenir le gel et prendre des mesures protectrices localement, les agricultrices et agriculteurs disposent aussi de stations météo ou de dispositifs de mesure de température en direct, au niveau du bourgeon ou de la parcelle.

Eviter le gel et le combattre

Pour éviter les dégâts du gel, il y a trois axes principaux: la protection par couche isolante, le chauffage direct et le brassage de l’air. Ces mesures sont réservées aux vignes et aux arbres fruitiers car trop compliquées pour les grandes cultures.

Protection par couche isolante

L’autre façon de combattre le gel est de chauffer l’air au moyen de bougies, de réchauds, de brasiers ou de chauffages à combustible. On utilise de préférence des dispositifs faciles à allumer, non dangereux et qui peuvent rester incandescents plusieurs heures. Ces chauffages sont efficaces mais ont pour principaux inconvénients qu’ils sont coûteux, qu’ils émettent du CO2 et que leur maintenance et gestion est compliquée. Il arrive aussi qu’en cas de pression de gel sur de grandes régions, ces bougies et dispositifs de chauffage deviennent introuvables car la demande est généralisée.

La problématique du gel de printemps sur les arbres fruitiers et les vignes
Asperger les arbres permet de protéger les fruits du gel. © Page Facebook Floraison des abricotiers en Valais

Chauffage direct

L’autre façon de combattre le gel est de chauffer l’air au moyen de bougies, de réchauds, de brasiers ou de chauffages à combustible. On utilise de préférence des dispositifs faciles à allumer, non dangereux et qui peuvent rester incandescents plusieurs heures. Ces chauffages sont efficaces mais ont pour principaux inconvénients qu’ils sont coûteux, qu’ils émettent du CO2 et que leur maintenance et gestion est compliquée. Il arrive aussi qu’en cas de pression de gel sur de grandes régions, ces bougies et dispositifs de chauffage deviennent introuvables car la demande est généralisée.

Lutter contre le gel grâce à des bougies, des réchauds, de brasiers ou de chauffages à combustible © Page Facebook Floraison des abricotiers en Valais
Lutter contre le gel grâce à des bougies, des réchauds, de brasiers ou de chauffages à combustible © Page Facebook Floraison des abricotiers en Valais
Bougie à pellets (de bois) de fabrication suisse en action © Ecosensors
Bougie à pellets (de bois) de fabrication suisse en action © Ecosensors

Brassage de l’air

Enfin, la dernière possibilité est les ventilateurs, qui permettent de brasser l’air. L’air froid, en effet, reste près du sol car il est plus lourd. Les ventilateurs, qui ont notamment été employés en Valais en 2021, brassent l’air en permettant à l’air plus chaud de réchauffer les couches plus froides au sol. L’effet est efficace mais ces machines sont chères, emploient beaucoup d’énergie, et ne peuvent hélas pas faire de miracle en cas de gel fort ou durable.

temoignages du terrain

Témoignages d’un arboriculteur et un viticulteur valaisan lors d’un épisode de gel en avril 2021 © AGIR

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